Après ce long intermède en terre helvétique, il est bientôt temps de s’embarquer pour un long voyage aérien et retrouver Viramundo à Hiva Oa, les Marquises, soit 35 heures au mieux avec les temps d’attente aux escales de Paris, Los Angeles et Tahiti.

Pour retrouver l’ambiance étonnante des Marquises rien de tel que la lecture d’un extrait d’un article paru au début de cette année dans la revue Géo. Il traduit bien notre ressenti pendant notre premier séjour là-bas!

“On devrait toujours s’y prendre à la manière de Robert Louis Stevenson: aborder les Marquises par la mer, après des jours et des nuits de traversée, le corps anesthésié par le clapot et le cœur bondissant d’apercevoir soudain, sur la ligne tremblée de l’horizon, le mirage tant attendu. Rien de tel qu’une arrivée par le large pour mesurer à quel point la réputation de cet archipel tient d’abord à sa folle géographie: Hawaii est à 4000 km au nord; les “voisins” de Tahiti, Moorea et Bora-Bora émergent de leurs beaux lagons turquoise à 1500 km plus au sud; vers l’ouest, l’Australie se trouve à 6500 km et, côté est, 5500 km séparent la Californie de cette terre, la plus éloignée de tous les continents.
 Ainsi parti du port de SanFrancisco à la fin juin 1888, l’auteur de l’île au trésor n’aperçut-il l’ombre bleutée des Marquises qu’au matin du 28 juillet, après plus d’un mois de navigation. On imagine la bouffée d’émotion. “Aucune partie du monde n’exerce une attraction aussi puissante”, écrivit-il après avoir jeté l’ancre dans la baie d’Anaho, dans le nord de Nuku Hiva. De quoi former un mythe, annoncer la découverte du paradis. Pourtant un mélange d’impatience et de peur suinte le récit. Ici pas de gentils lagons en guise de bienvenue, mais des crêtes en “lames de rasoir”, des côtes sombres où retentissent “les explosions du ressac”, des pitons de plus de 1000 mètres filant vers les cieux comme les tours d’une église”. Un paysage taillé au scalpel qui lui rappelle son Ecosse natale, mais dont il sait, en bon lecteur d’Herman Melville, qu’il abrita aussi quelques rites anthropophages….Au total 1000 km carrés d’escarpements, soit 8 fois moins que la Corse. 14 îlots minuscules dans le bleu cobalt du Pacifique, dont seuls 6 sont habités. Aujourd’hui, la population ne dépasse pas 9000 habitants. Si bien que des pans entiers de ces montagnes volcaniques sont livrés à la végétation la plus exubérante et demeurent le territoire exclusif des cochons sauvages, des chèvres, des chevaux en liberté ou encore des fameux nonos , comme on appelle ici ces moucherons suceurs de sang qui, certains jours, peuvent vous rendre fous. Telle est l’âpre réalité des Marquises. Derrière ce nom précieux et suavement féminin, donné en 1595 en l’honneur de l’épouse du vice-roi du Pérou par un conquistador espagnol, se dissimulerait presque une manière de tromperie sur la marchandise.
Les premiers Polynésiens avaient fait preuve d’une plus grande honnêteté en baptisant les lieux Te Fenua Enata (“la terre des hommes”). Car homme, il faut l’être assurément pour vivre dans cet enclos à la rudesse absolue, qui n’est même plus un bout du monde, mais plutôt le commencement d’un autre. A l’évidence, sur ces cailloux de basalte à l’écart de tout, les symptômes de l’insularité sont exacerbés.”L’isolement fait qu’hier comme aujourd’hui, les rapports humains, la solidarité, la mutualisation des ressources, mais aussi le lien très fort avec la nature, sont restés visibles”. Et dans la moiteur, le rapport au temps, donc à la mort, n’est pas le même qu’ailleurs non plus. Pour les Marquisiens,le passé ne s’oppose pas au futur, hier et aujourd’hui sont mêlés. Et la langueur polynésienne, prend tout son sens. A part pour chasser ou pêcher, à quoi bon courir? Il n’y a nulle part où fuir, nulle gloire à conquérir.”

Si tout va bien, une fois Viramundo remis à l’eau au chantier Maintenance Marquises Services à Hiva Oa, en fonction de la météo et des aléas possibles (!),nous allons d’abord visiter les îles du nord des Marquises, vraisemblablement Ua Pou et Nuku Hiva. 

Puis quelques jours de traversée devraient nous permettre de faire escale aux îles Tuamotou, des îles complètement différentes des Marquises, car elles sont sans relief et formées d’un anneau corallien qui peut mesurer plusieurs dizaines de kilomètres de diamètre.


Vu de l’avion au mois de mars dernier, Ahé, une île atoll des Tuamotou, où séjourna B.Moitessier pendant quelques années.

Pour notre dernière escale de 2018, nous changerons encore d’archipel, car Viramundo passera l’été austral, à terre, à Raiatea, au Chantier Naval des Iles sous le Vent, dans l’archipel des Iles de la Société. L’île de Raiatea est voisine de Bora-Bora; alors que Tahiti est distante de 200 km “au vent”.

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